New deal, ou régression ?
C’est la question que l’on peut se poser en ce début d’application du nouvel arrêté préfectoral réglementant la permanence de soins des praticiens libéraux.
La permanence de soins a été longtemps basée sur une organisation confraternelle et consensuelle des praticiens exerçant dans le même bassin de vie, en général à l’échelle du canton .
La réglementation officielle est arrivée quelques temps après l’instauration des 35 heures, merci Martine, les tutelles ayant peur que les libéraux non concernés par cette mesure s’auto-appliquent cette loi la nuit et le week end , histoire bien sûr de profiter un peu de leurs émoluments de la semaine , c’est légitime.
Les lois réglementant la PDS ( permanence de soins ) sont un alambic de complications puisque la PDS est officiellement basée sur le « volontariat » des praticiens , mais avec une obligation de présence , au besoin par réquisition préfectorale. Cette participation à la PDS ne pose pas de problème pour un généraliste vivant en adéquation avec la patientèle de son bassin de population ; quelques praticiens en Médecine d’exercice particulier (MEP) , « thérapeutes » improbables mais patentés , se refusent à soigner les gens effectivement malades au temps T et donc à intégrer la PDS.
Il faut savoir que la PDS réglementaire impliquant les praticiens de terrain ne couvre que la nuit de 20 h à 8 h et le week end du samedi 12 h au lundi 8 h , ce qui en prenant le problème à l’envers laisse penser que les libéraux travaillent de 8 h à 20 h et le samedi de 8 h à 12 h soit 64 h par semaine ; ou qu’il n’y a pas d’urgence la journée ; ou que c’est le centre 15 qui gère seul la journée …?
Mais cette organisation de PDS est confrontée à plusieurs problèmes :
– le vieillissement des praticiens de terrain, en 1981 lors de mon installation la moyenne d’âge des médecins du canton était de 33 ans , en 2009 de 53 ans .
– la baisse de la démographie médicale avec un pic à 8 praticiens en 1997 sur le secteur , pour se retrouver 4 fin 2009.
– les considérations comptables de tutelles qui estiment que 35 secteurs de permanence pour le département ardéchois (300 000 habitants ) sont une aberration par rapport aux ratios parisiens intra-muros où la PDS compte 2 à 3 praticiens libéraux pour un arrondissement 3 à 4 fois plus peuplé….
Le vieillissement et la baisse de la démographie médicale sont une conséquence directe de l’instauration en 1971 du « numerus clausus » à l’entrée de la fac de médecine ; ( voir le commentaire en fin sur le numerus clausus).
La nouvelle organisation préfectorale des astreintes médicales s’inscrit dans la lignée de toutes les litanies de regroupements que nous vivons depuis des années au sein des services publics et des services au public : DDE, EDF, églises des confessions locales comprises.
Tous ces facteurs qui ne sont pas spécifiques à notre localité ont abouti à une nouvelle organisation de la PDS libérale par arrêté préfectoral appliqué au 1 octobre 2009.
Le nombre de secteurs ardéchois passant ainsi , dans la douleur pour certains, de 35 à 20/22.
Certains secteurs ont refusé et sont susceptibles d’être réquisitionnés.
En ce qui nous concerne localement les anciens secteurs de Lamastre, Vernoux-Alboussière-Chalencon et Colombier le Jeune sont regroupés en 1 seul secteur , ce qui fait passer le nombre de praticiens à 9 pour la rotation .
Mode d’emploi :
Pour le citoyen- consommateur malade potentiel ceci implique un changement d’habitude.
Pour Lamastre les habitants avaient depuis 1920 l’habitude de pouvoir se présenter à l’Hôpital Local et d’y être médicalement accueillis pour les détresses médicales , le nouveau planning des permanences laisse statistiquement 55 % de temps nuit et week end pendant lequel la permanence sera effectuée par un praticien non basé à Lamastre, il faudra donc changer les habitudes et passer par la régulation du centre 15/18 qui s’assurera de la présence d’un médecin pouvant intervenir sur le site .
Pour les corps de Sapeurs Pompiers dotés d’ambulances VSAB à savoir Lamastre Vernoux Desaignes Chalencon ceux-ci se retrouveront aussi avec une possibilité d’intervention sans médecin dans 55 % des cas , ce qui va multiplier les évacuations directes (rush and go ) ,en jargon d’urgentistes, vers les établissements de la vallée du Rhône; les corps de Sapeurs Pompiers sont parfois dotés d’infirmiers (ères) , mais il faut se rappeler que ce sont tous des volontaires et que si les sorties sont quotidiennes surtout nocturnes il y aura vite saturation des personnels.
Je ne vous parle volontairement pas de la permanence des pharmacies, les secteurs sont différents, les effectifs des pharmaciens et des médecins ne sont pas en adéquation, il n’y a donc pas obligatoirement correspondance des permanences, les arrêtés préfectoraux n’ayant pas intégré ce paramètre.
Il convient donc en priorité de ne pas être malade,(vous avez d’ailleurs bien fait d’en profiter tant qu’il y avait des médecins …), ensuite de bien penser à se référer à la régulation téléphonique du centre 15/18 afin de pouvoir être guidé sur le site le plus adapté au problème .On s’oriente en fait vers une régulation qui délèguera la « bobologie» aux généralistes et fera intervenir des moyens d’intervention type SMUR –SAMU-POMPIERS pour les cas difficiles, discriminant ainsi les urgences vraies des pressenties. L’économie réalisée de façon comptable par la diminution de l’offre de soins corollaire de la pénurie de médecins organisée va irrémédiablement entraîner une augmentation des moyens dédiés aux moyens d’interventions rapides (ambulances médicalisées SMUR, hélico) et aux services d’accueil des urgences, déjà saturés et eux aussi confrontés à la pénurie de médecins ; on se mord un peu la queue et je ne suis pas certain qu’in fine il y aura économie, mais sûrement transfert budgétaire.
L’inquiétude légitime et les interrogations des citoyens et des praticiens de terrain résident bien sûr dans la grosse urgence et le temps de réaction de toute la chaîne d’organisation ; on parle en jargon administrativo-médical des notions typiquement « militaires » de « perte de chance » et de « de temps d’intervention optimisé » et là ce sont les protocoles validés qui, s’ils sont appliqués et réalisables, sont censés donner la réponse…
En résumé :
En cas de problème médical nécessitant une consultation « non programmée »
– Commencer par appeler son médecin traitant.
– En cas d’absence :
o essayer éventuellement un autre praticien, mais c’est aléatoire.
o contacter le centre 15/18 qui assurera le conseil et la prise en charge adaptée du problème médical par l’intermédiaire du médecin régulateur.
En cas d’urgence vitale téléphoner au centre 15/18
Dr Raymond BOUIT Octobre 2009 .
Numerus clausus ?
Qu’est ce que le numerus clausus ?
C’est une décision politique et comptable mise en place en 1971 par la ministre de l’époque Simone Weil.
Cette décision entrait dans le cadre de la maitrise des dépenses de santé et visait à diminuer le nombre d’étudiants en médecine passant le cap de la première année.
Le nombre d’étudiants en 2° année est ainsi tombé de 12000 à 8000 entre 70 et 71, pour baisser encore jusqu’à 3500 en 1993, pour remonter doucement à partir de 2000 jusqu’à 7000 actuellement.
Le dogme comptable affirmant que s’il y a moins de médecins, il y aura moins d’offre de soins, donc moins de dépenses de santé, donc des économies.C’est un raisonnement basique mais très simpliste.
Les comptables n’ont pas intégré tous les paramètres de l’exercice médical :
-la féminisation de la profession, les femmes ayant la particularité de faire et éventuellement élever des enfants, ce qui les rend professionnellement moins disponibles.
-l’émergence de nouvelles spécialités : échographie, imagerie, informatique médicale, médecin de tutelle, médecin coordonnateur, modes d’exercice qui limitent le nombre de praticiens au contact direct des malades.
– loi sur les 35 heures et sur le repos compensateur après les gardes qui multiplient les agents sur les roulements de planning.
Nous payons actuellement, avec un manque de médecins qui va en s’aggravant et pour longtemps, le prix de cette décision politique et comptable prise en 1970 visant à limiter l’offre de soins à la population.
Chic, je vais peut-être voyager en hélico? Sympa!
Le seul écueil , c’est d’être vivant à l’arrivée dudit engin… Je ferai un effort! Mais…
En ce qui concerne le numerus clausus, cher Raymond, après avoir démontré son inefficacité, plutôt sa nuisance, il continue allègrement à satisfaire notre structure administrative dont nul ne peut nier la grande efficacité. Mais n’oublions pas que les médecins sont un des plus puissants lobby de notre Parlement. Alors?
Mais tout ça va changer. Maintenant, avec une seule année de Droit validée on pourra se faire élire président de l’EPAD (Centre de la Défense)… dès 22 ans!
Roulez jeunesse…
ON POURRAIT RAJOUTER AUSSI LA SECTORISATION DES AMBULANCES PRIVEES QUI EST ENCORE DIFFERENTE LORSQUE CELLES CI SONT DE GARDE SOUS ASTREINTE DU SAMU 07.
LE MEDECIN DE GARDE NE SACHANT PAS SI L’AMBULANCE PRIVE DE GARDE EST PARTIE.
TROUVER DES SECTORISATIONS QUI SOIENT COHERENTES(ENTRE TOUS LES ACTEURS) SEMBLENT ETRE LE MINIMUM .ON EN EST LOIN
Hervé Mourrat
et si l’on continue ainsi nous allons bientôt « marcher sur la tête », alors … qui s’occupera de nous ???
le 15? les pompiers? les docteurs?
that is the question !!
Vero Laurent
Pour une intervention de secours à personnes effectuée par les pompiers avec une évacuation vers la vallée du Rhône, il faut savoir que la durée de l’intervention sera d’environ 3 heures voire plus contre 1 heures si l’évacuation se fait à l’hôpital de Lamastre. Donc je confirme bien les propos du Docteur Bouit à savoir la saturation du personnel,qui se fait déjà resentir. Egalement va se rajouter le problème de la disponibilité des sapeurs pompiers volontaires envers leurs employeurs,3 heures pour chaque intervention de secours à personnes.De plus une couverture opérationnelle des ambulances sera reduite,il faudra attendre les centres voisins avec les délais de route connue à l’Ardéche…..
Pimpon Lamastre ,Damien Vallon
je suis d’accord avec Pimpom et DR Bouit .Je m’inquiete surtout pour les gens et les délais qu’ils devront attendre pour avoir des soins médicaux …je ne parle pas de <> …si vous etes allergique, epileptique,cardiaque …. ou si vous avez un accident grave…choisissez votre moment ..ou attendre 1h 30 avant d’arriver dans la vallée .Les infirmieres sapeurs pompiers protocolées (3 pour le canton de Lamastre )pourront améliorer la situation MAIS ne remplaceront jamais le médecin …
Elles ne peuvent pas assurer la dispo 24h sur 24h ….
L’helico 26/07 intervient s’il est dispo et si la meteo le permets et la jounée seulement..la jonction par la route est possible =1 h environ
Isabelle ASTIER infirmière sapeur pompier
PS le terme qui n’est pas apparu sur le commentaire est le mot que le monde de la sante utilise pour citer les urgences ressenties « les Bobos de tous les jours »
je parlais donc des urgences vraies …
[…] numerus clausus: http://www.lamastre.net/2009/10/13/351/comment-page-1/#comment-8 Publié dans Reportages | Tags : bouit, bouquet, farjas, guiot, langin, medecins […]
Ce mercredi matin sur la matinale de france inter le témoignage d’un lamastrois
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