« Fiat lux » « que la lumière soit »
Depuis des siècles Désaignes s’enorgueillit d’un riche passé historique : cité fortifiée dont il reste de magnifiques vestiges , place forte Réformée pendant les guerres religieuses, siège d’un important maquis pendant la Résistance.
Le propre des historiens est d’écrire l’Histoire, mais aussi parfois de la réécrire, de l’agrémenter, de faire abstraction de certains faits , d’en promouvoir d’autres ,et ainsi orienter les esprits du présent en fonction de faits passés réels ou supposés.
Les discussions des historiens portaient sur la possibilité d’un passé Romain sur la commune. De nombreuses thèses s’affrontent et ont été reprises par des écrivains et compilateurs d’histoires locaux.
En résumé deux thèses sont , ou plutôt étaient en présence ; celle des défenseurs d’un passé Romain pour Désaignes , les arguments développés s’appuient en grand partie sur la présence de l’édifice architectural actuellement temple Réformé dont le fronton classique serait un vestige d’un temple romain dit Temple de Diane , cette thèse a de nombreux défenseurs , souvent catholiques pratiquants ou membres du clergé pour lesquels la filiation Romaine pour Désaignes datant de l’Empire Romain ne fait aucun doute , cette affirmation reprise tout au long des ans faisant ainsi partie intégrante du passé historique local . Un manuscrit exhumé récemment, déposé en Mairie et, écrit par Jule Charra grand castrateur « spirituel » de camisards et pourfendeur par l’écriture des mécréants réformés, mode de pensée normatif pour certains esprits sectaires au début du 20 ° siècle , nous décrit ce monument :
Ce même auteur y fait une description très didactique de thermes romains, dont aucune trace n’a été trouvée à Désaignes , il s’agit là simplement d’une extrapolation démagogique en relation avec les sources d’eau minérale dont une est dédiée à César et l’autre à Moïse… à quelle Divinité se vouer?
D’autres auteurs attestent ce passé romain , et comme toutes les règles nécessitent des exceptions , Boissy d’Anglas, « citoyen Boissy » à l’époque, adepte de la religion réformée attribue le temple à Hercule.
Paul Bouit dans son livre se démarque :
Dissertations et divagations diverses
Voici donc la description de cet édifice dans lequel Boissy d’Anglas ne voulait voir qu’un temple romain. Dans sa réponse au questionnaire de 1759, le chevalier Tournon de Meyres avait été beaucoup plus prudent en se contentant d’écrire: «l’idée générale qu’on en a…» Pourquoi Diane? Etait-ce parce qu’en latin médiéval Desagne s’écrivait DISANIA, mais DESAN] en vieux français du coin.
Soulavie lui, aurait plutôt penché pour un temple druidique, mais sans rien affirmer.
Le Père Colonia, archéologue lyonnais, était affirmatif: Temple druidique, et cela, uniquement sur le vu de la description de Meyres. Boissy d’Anglas n’est pas d’accord, les druides célébrant leur culte en plein air. En raison de la solidité, de la rusticité et de l’absence de tout ornement, il en déduit que le «temple» est antérieur au siècle d’Auguste et qu’il s’agit d’un temple élevé à HERCULE, par un général romain. Pourquoi à Hercule?
Le Président DELICHERE tient pour un autre Hercule, Gaulois celui-ci et ajoute que si le bâtiment avait été un temple de Diane, il aurait été détruit p,ar les premiers chrétiens. Pourquoi donc ces premiers chrétiens auraient-ils sauvegardé un temple dédié à Hercule et détruit celui de Diane?
Jules ROUSSET réfute tout le monde, sans savoir à quel dieu se vouer.
Quant au fantaisiste OVIDE DE VALGORGE, il opine pour Diane, non que la chose lui paraisse prouvée, mais parce que cette version est celle qui s’accommode le mieux du monde à l’imagination du poète et de l’artiste. Il fallait le dire! .
Bourrés de latin, tous ces érudits ne voient que par Rome et méprisent le Moyen-âge.
Essai de conclusion
Terminons avec l’Annuaire départemental, An 10 (1802) qui consacre un chapitre aux antiquités de l’Ardèche. L’un est celui qu’on voit a Desaignes, CONNU SOUS LE NOM de temple de Diane, décrit par l’abbé Giraud-Soulavie et qui a donné lieu a une dissertation imprimée du citoyen Boissy d’Anglas. Ce tribun croit que cet édifice est un des deux temples élevés par Q. Fabius Maximus, à l’occasion de la victoire qu’il avait remportée sur Bitutius, roi des Auvergnats. Peut-être pourrait-on opposer quelques objections a cette opinion? Peut-être faudrait-il avant tout reconnaître le VRAI CARACTERE de cet édifice, et décider si c’est un temple et s’il est de construction romaine ?» Admirons la prudence du rédacteur anonyme de l’An X et suivons ses conseils.
…… pourquoi ne pas dire que ce vieux monument serait le tout premier château bâti en dur par les premiers seigneurs de Desaignes, les Retourtour, ou leurs prédécesseurs inconnus, au 11ème ou 12ème siècle?
Pourquoi aller chercher midi à quatorze heures et à Rome ce qui est de chez nous?
Paul Bouit , livre Désaignes Pages d’histoire.
Paul Bouit auteur pétri de culture parpaillote faisait preuve d’un grand scepticisme quand au passé romain de sa chère cité de Désaignes , berceau de sa famille paternelle, il a donc fait cette revue de détail des différentes thèses pour en déduire que le bâtiment existant avant le temple réformé devait être une partie du château de Désaignes, son argument était qu’aucune pièce ou monnaie métallique de l’époque romaine n’avait été trouvée sur le bourg ; rappelons que les travaux d’aménagement du lotissement de la grange rive droite du Syalles , travaux postérieurs à son ouvrage d’histoire locale( édité 1990) ,avaient mis à jour des canalisations en pierre qui avaient fait émettre l’hypothèse de traces de thermes romains , mais la Drac consultée en urgence n’y avait vu que canalisation d’irrigation et avait autorisé le lotissement. ( http://www.culture.gouv.fr/rhone-alpes/ )
Mais une grande découverte vient de faire progresser la connaissance, une équipe de copains amateurs de recherche d’objets antiques métalliques par l’intermédiaire de l’outil communément appelé « poêle à frire » a découvert un gisement , « le gisement » qui apporte la preuve irréfutable du passé Romain de Désaignes . Cette découverte qui date de l’automne a été tenue secrète pour éviter une « ruée » de curieux et d’amateurs de reliques anciennes. Le matériel de détection de dernière génération très performant utilisé est pour beaucoup dans cette découverte. Paradoxalement ce n’est pas au bourg que cette découverte a été faite , je ne dois pas bien sûr vous dévoiler le lieu précis car c’est sur une parcelle privée et les tractations entre découvreur , propriétaire et administration sont encore en cours, on peut simplement dire que ce n’était pas au Château ni au temple qu’il fallait chercher mais vers la Citadelle….
Comment cette découverte a-t-elle été faite ? Tout d’abord c’est une pierre qui a attiré l’attention, cette pierre de granit portait des marques spécifiques :
-une couronne de laurier semblable à celle que les romains portaient lors des triomphes et des fêtes,
– une partie évidée évocatrice d’une prise en main à type de poignée .
– et surtout une inscription relativement bien conservée où l’on peut voir le saign de disaignia
C’est donc sous cette pierre que le détecteur a indiqué une présence métallique , les fouilles ont permis de découvrir une partie de statue de bronze en forme de buste qui a pu être datée du deuxième siècle après JC .
Cette découverte tenue secrète jusqu’à aujourd’hui va faire l’objet d’une reconnaissance officielle par la venue exceptionnelle de spécialistes Romains pour Pâques , ceux-ci vont inspecter le site et se concerter avec la Drac pour le suivi des fouilles à venir . ( http://www.rome-roma.net/sculptures-musees-du-capitole.html )
Le calendrier espéré en 2010 par les autorités locales comportera bien évidement une partie festive et conviviale de promotion qui aurait toute sa place pour la course pédestre « la voie Romaine »(la bien nommée) ( http://www.trailardechois.com/ ) .Avec présentation d’un diaporama et des objets trouvés : statue, sesterces et armes , soit au Château , soit si c’est possible au Temple, ce serait un juste retour des choses ; un deuxième volet festif a été évoqué pour la Fête médiévale avec organisation d’une marche- découverte au départ du bourg en direction du gisement avec les découvreurs et des spécialistes pour une « conférence sous l’arbre » ; la médiévale devenant pour la circonstance« la Citadelle romaine ».
Les pièces trouvées sur le gisement:
Voilà on vous en a assez dit, il faut reconnaitre que cette découverte à laquelle j’ai pu participer constitue pour moi un véritable « parricide » puisque elle met en défaut le livre de Paul Bouit .
Et nous ne pouvons que conclure « errare humanum est » et surtout « Tu qoque, fili ! »
Raymond Bouit.
Ce magnifique article est donné en lien sur la page wikipédia de Désaignes comme justifiant la riche histoire gallo-romaine du village….
estelle mazat
Effectivement ce article constitue une vraie contribution au débat sur l’Histoire de Désaignes , où plutôt sur les histoires de Désaignes, et a sa place sur Wikipédia.
Le deuxième degré est une façon d’informer qui a le mérite en faisant sourire de limiter l’effet de certaines affirmations , on aime ou on n’aime pas , pour ma part je l’affectionne…
Raymond Bouit
J’ai beaucoup apprécié cet article, pas de méprise!
En lisant l’article sur Désaignes dans Wikipédia, je me suis juste demandé si l’auteur de l’article avait mis ce lien en toute connaissance de cause ou non.