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« MA GUERRE D’ALGERIE »

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Un vrai succès cette fin d’après-midi du 1er avril, prolongée en soirée sur le thème très sensible de la guerre d’Algérie .

Le spectacle – monologue, poétique et plein d’émotion a capté les 70 spectateurs très attentifs . Bernard Gerland auteur du monologue, par sa gestuelle, ses silences, sa  diction forte et précise, a su faire vivre le contexte de cette guerre et susciter  de nombreuses questions.

50 ans après , cet échange n’ efface pas les terribles moments de la loi de la guerre, mais il permet de faire le travail de mémoire pour sortir de ce pesant silence et d’ approfondir les questions.

bernard gerland guerre algérie

Puis « l’assiette Algérienne » avec la confection d’un « hraïch »* à base de semoule et de délicieuses aromates, de tomates, servi avec un thé vert, et d’excellentes patisseries orientales ** (corne de gazelle, griwech, baklawa) compléta agréablement la 1ère partie.

guerre algerie conférence gerland lamastre

Le lugubre documentaire « octobre à Paris » figea l’assemblée dans un grand silence,  en découvrant la sauvagerie infligée aux Algériens le 17 octobre 1961 à Paris lors d’une manifestation. Ils protestaient alors pacifiquement contre le couvre-feu décrété à leur intention par le Préfet de Police M. Papon.

« La guerre d’Algérie n’est pas terminée.

Elle se poursuit dans cet énorme silence qu’elle a creusé en nous.

Comment ne pas voir que la honte peut entrainer la haine, et que, sans une démarche de réconciliation avec soi-même et avec autrui, tout peut recommencer demain. »

B. Sigg

un article de Ginette Cheynel.

*     élaboré par Eliane

**    La Roz des Sables présent sur le marché de Lamastre chaque mardi

Une réponse à to “« Ma guerre d’Algérie ».”

  • Merci à l’équipe du cinéma lamastrois qui nous a permis de passer une journée si intéressante. Le spectacle de Monsieur Bernard Gerland nous a fait plonger de façon très vivante dans le désastre que fut cette guerre d’Algérie qui aujourd’hui encore hante les inconscients personnels et nationaux dans nos deux pays. Il nous a permis d’approcher la nature paradoxale et la fragilité de nos valeurs et de nos comportements humains.

    Le film sur le massacre des Algériens manifestant pacifiquement à Paris le 17 octobre 1961 nous a permis de comprendre la tragédie de ces exactions (des centaines de tués algériens) et de ne plus confondre cet évènement avec la manifestation du 8 février 1962 au métro Charonne (9 tués français).

    Il me semble très important que ces moments mémoriels se développent en France, mais aussi en Algérie où la recherche historique peine à se frayer un chemin dans l’histoire officielle mise en place par les hommes au pouvoir depuis 1962.

    J’ai apprécié les échanges qui ont suivi et qui n’étaient pas de l’ordre du débat. En effet, je crois que nous avons tous en commun notre ignorance sur l’ampleur du désastre et ses multiples aspects.

    Je m’intéresse depuis mon adolescence à la guerre d’Algérie et à l’Algérie. Pour des raisons familiales, mon père (décédé en 1999) ayant participé à cette guerre, et parce que je suis convaincu que seule la recherche de la vérité, y compris sous les aspects qui contrarient nos convictions ou nos connivences, est une des conditions qui pourraient permettre une vraie réconciliation en France et en Algérie.

    Chaque approfondissement de la question de cette terrible guerre me plonge dans les abîmes d’une réflexion qui est loin d’être terminée. Quelques points clés et quelques interrogations :

    1/ La première chose, c’est la dignité incroyable, l’héroïsme du peuple algérien, pendant ces évènements. Il fit face à une conquête à partir de 1830 où de nombreuses exactions furent commises contre la population, 130 ans d’humiliations, de révoltes, de massacres… Il fit face à la quatrième armée du monde qui utilisa les moyens les plus inhumains pour le briser. Il supporta de terribles dissensions internes et même une guerre civile de 1992 à 2002 (plus de 100 000 morts ?). Et malgré cela, en Algérie, quel accueil, quelle amitié pour les Français. Quel grand peuple !

    2/ Un nombre de victimes considérable : environ 400 000 côté algérien, y compris les morts liés aux combats fratricides entre Algériens et environ 100 000 côté français. Ces chiffres pourraient être plus importants côté algérien, notamment si l’on compte les personnes mortes de malnutrition (dont beaucoup d’enfants) suite aux déplacements massifs de population. Du côté français on pourrait rajouter presque 2 millions de soldats marqués pour le restant de leur vie parce qu’ils ont vu, fait ou subit en Algérie

    3/ Des exactions dont je ne soupçonnais pas l’ampleur et la sauvagerie.
    Une terrible répression sur les civils, la destruction de nombreux villages, des viols. La torture et les assassinats sommaires d’Algériens combattants furent quasiment systématiques. Dans ce contexte, il est même incroyable que François Mitterrand, ministre de la justice entre 1956 et 1957, ait pu obtenir que 45 militants algériens soient guillotinés dans un cadre légal.
    La quantité d’exactions de la part des Algériens et le nombre de victimes ne furent pas comparables.

    4/ Et j’ai des questions, de nombreuses questions :
     Pourquoi la responsabilité des hommes politiques dans ces exactions est presque complètement occultée ?
     Qu’est-ce qui fit que des militaires appelés, ou professionnels comme le général Jacques de Bollardière, résistèrent aux pratiques inhumaines ?
     Comment et pourquoi une partie du clergé, Monseigneur Duval archevêque d’Alger par exemple, prit le parti de l’indépendance et la nationalité Algérienne à l’indépendance ?
     Comment et pourquoi des personnalités « libérales » comme Monsieur Jacques Chevallier, ancien maire d’Alger ont pu choisir de rester en Algérie après 1962 et ont obtenu la nationalité algérienne ?
     Quel patriotisme algérien animait des personnes d’origine européenne comme l’aspirant Henri Maillot qui se considéra dès le début de la guerre comme un Algérien à part entière, qui se devait de prendre les armes avec ses compatriotes ?
     Quelle fut d’ailleurs l’action de son parti, le Parti Communiste Algérien, qui semble avoir lutté pour une Algérie indépendante, laïque, où tout le monde pourrait vivre fraternellement ensemble ?

    5/ La guerre d’Algérie continue aujourd’hui en France
    En réalité presque rien n’est fait pour affronter et résoudre efficacement les problèmes rencontrés par les Français d’origine algérienne : le racisme quotidien, la misère et l’insécurité des banlieues, la ghettoïsation, le communautarisme, l’islamisme radical, etc.

    Les non-dits de cette guerre induisent inconsciemment toute une gamme de comportements en France :
    Un malaise chez nos concitoyens d’origine algérienne ou maghrébine, parfois écartelés entre des loyautés qu’ils peuvent ressentir comme inconciliables.
    « A gauche » et à l’extrême gauche, un malaise pour prendre en compte les problèmes liés à la délinquance, au racisme « anti-gaulois », dès lors que des personnes d’origine maghrébine sont impliquées. Et aussi pour réagir clairement face aux dogmes et à l’esprit de croisade islamiste (je fais bien sûr la différence entre l’Islam, une religion parmi d’autres, et l’islamisme radical qui prétend imposer à tous ses conceptions de la vie en société).
    A l’extrême droite et dans une partie de la droite :
    Cinquante ans après, ils essaient encore d’entretenir chez les Français un esprit de revanche infondé et insensé. Ils ont pourtant longtemps défendu l’idée de l’Algérie Française, tout en refusant aux Algériens le droit d’être des Français à part entière. Avec le recul, on peut s’étonner qu’ils parlent aujourd’hui « d’occupation » de la France par une minorité musulmane car, si nous les avions suivis, la « France-Algérie » serait aujourd’hui un grand pays de 105 millions d’habitants, dont plus de 40 millions de culture arabo-berbéro-musulmane, soit 40% de nos hommes politiques, de nos députés, de nos préfets… et pourquoi pas notre Président de la République… Chiche !

    La guerre d’Algérie, qui a commencé en 1830, n’est malheureusement toujours pas finie. Un trop grand nombre de Français continue d’humilier et de rejeter un peuple dont une partie est membre de notre communauté nationale. En réaction à cet ostracisme, des comportements inacceptables se développent.
    Si nous ne voulons pas sombrer à notre tour dans une guerre civile, il y a urgence à reconnaitre (cf. les commissions « Vérité et Réconciliation » en Afrique du Sud) le mal qui a été fait et à mettre en place concrètement les valeurs républicaines de liberté, d’égalité, de fraternité, de laïcité qui nous permettront enfin de vivre ensemble, fraternellement.

    Dominique Gaillard

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