Projection du film : « BOVINES » d’ EMMANUEL GRAS (documentaire – France – 2012 – 1h04)
Dans les champs, on les voit, étendues dans l’herbe ou broutant paisiblement. Grosses bêtes placides que l’on croit connaître parce que ce sont des animaux d’élevage. Lions, gorilles, ours ont toute notre attention, mais a-t-on jamais vraiment regardé des vaches ? S’est-ont demandé ce qu’elles faisaient de leurs journées ? Que font-elles quand un orage passe ? Lorsque le soleil revient ? A quoi pensent-elles lorsqu’elles se tiennent immobiles, semblant contempler le vide ? Mais, au fait, pensent-elles ?
Au rythme de l’animal, au milieu d’un troupeau, Bovines raconte la vie des vaches, la vraie. On pourrait légitimement classer Bovines dans la catégorie des «documentaires animaliers», mais ce serait prendre le risque d’induire le spectateur en erreur. Si celui-ci attend une variation instruite autour du «peuple vache», s’il imagine avoir affaire à une nouvelle superproduction genre du type Félins ou Océans, il sera fatalement trompé. Mais pas nécessairement déçu. Bovines est avant tout un geste. Un geste de filmeur doué et constant, qui plante sa caméra dans une prairie de France, à quelques mètres d’un troupeau de vaches couleur crème, placides et majestueuses. Pas de voix off, pas de texte explicatif, juste la contemplation empathique et sereine du troupeau de charolaises et de ses habitudes ruminantes. Pour tenir le spectateur dans la durée avec ses seules splendides vaches pour sujet, Emmanuel Gras fait preuve d’un don parmi les plus rares : celui de la bonne distance. Ici, tout est affaire de plan juste, de cadre fort, de son vrai, de cordeau précis comme dans la construction picturale classique de maîtres anciens. Bref, tout est ici question de style. Non seulement le style rigoureux du cinéaste mais aussi celui de ses «actrices» : tendres, émouvantes, fringantes et racées, les vaches de Bovines ont sacrément du chien. Le style étant lui aussi une affaire de morale, il finit par produire un genre d’osmose inattendue : le cinéaste et ses vaches se rejoignent dans une sorte de douce obstination à vivre là, au présent, dans l’instant du plan, dans un face-à-face patient, terrien, puissant, tout en langueur et force. A force de patience, Emmanuel Gras a su transformer son premier long métrage en expérience sensitive.
Discussion – échanges à l’issu du film avec JOCELYNE PORCHER
Depuis 2003, Jocelyne Porcher est chargée de recherches à l’Inra Sad-Apt (INAPG-Paris). Ses recherches portent sur la relation de travail entre éleveurs et animaux en élevage et dans les productions animales. Elle s’est engagée dans une démarche de recherche après avoir été éleveuse et technicienne agricole. Aujourd’hui, elle aimerait que la recherche s’ouvre à des personnes qui ne sont pas issues du système universitaire. « Une dure bataille » dit-elle « contre le « destin » social, et contre mes « chers collègues », ceux des porcheries puis ceux de la recherche sur le « bien-être animal », à qui mes idées comme moi-même étaient étrangères. » Alors qu’elle débute des études agricoles (BTA), elle découvre la production porcine. Les questions se bousculent alors dans la tête de Jocelyne Porcher : qu’est-ce que l’élevage ? A quoi sert la violence dans les porcheries ? Ai-je une sensibilité particulière parce que je suis une femme ? Parce que je suis néo-rurale ? Questions qu’elle a d’ailleurs travaillées dans sa thèse Éleveurs et animaux, réinventer le lien, parue en 2002, aux éditions PUF, et qui a reçu le prix « Le Monde la Recherche Universitaire ». Après le BTA, Jocelyne continue un BTS « productions animales », puis enchaîne sur une formation continue d’ingénieur agricole. Elle comprend alors que son champ de réflexion peut s’inscrire, d’un point de vue scientifique, dans la problématique du « bien-être animal », sujet sur lequel elle commence à travailler avec des chercheurs de l’INRA.Insatiable, une fois son diplôme d’ingénieur en poche, elle s’inscrit en DEA et travaille à la Bergerie Nationale de Rambouillet comme chargée de mission sur le bien-être animal, où elle cherche à mettre en évidence, ce qui deviendra le socle de sa thèse et de son travail ultérieur : le lien de bonheur et de souffrance partagés qui existent entre éleveurs et animaux. Pour la première fois, elle montre que dans les systèmes industriels, les travailleurs souffrent également de la souffrance qu’ils infligent aux animaux. Dès lors, comment tiennent-ils au travail ? Pourquoi ?… Qu’on ne s’y trompe pas, ce n’est pas contre les éleveurs que Jocelyne Porcher est en guerre. Elle cherche simplement à montrer que l’élevage est un métier qui rend heureux, les humains et les animaux. « C’est la vie que je défends, la vraie vie, relationnelle, affective… et la science qui va avec « . Jocelyne Porcher a su mettre au service de la science, sa passion pour l’élevage et ne cesse de défricher ce nouveau champ de réflexion sur l’intime relation qui se noue entre les hommes et les animaux au travail.
Après cet échange entre le public et Jocelyne Porcher, un apéro et un repas (à base de viande de bœuf) seront proposés à ceux qui souhaitent continuer le débat autour d’un bon repas!
Dimanche 30 SEPTEMBRE 2012 au centre culturel de LAMASTRE
|
HORAIRES
|
Film: BOVINES (durée 1h04) |
15h30
|
Suivi d’un échange entre le public et JOCELYNE PORCHER |
17h00
|
Apéro – débat |
18h30
|
Repas: (salades, bœuf en daube, pommes de terre, dessert et un verre de vin) |
19h00
|
TARIFS :
Cinéma : 4 € à partir de 12 ans / 2.50 pour les moins de 12 ans
Forfait film + échanges – discussion + apéro + repas : 15 € à partir de 12 ans / 12 € pour les moins de 12 ans
Il est possible et même fortement recommandé de réserver vos places, par tous les moyens de communication mis à votre disposition. Attention, réservation obligatoire pour les repas
ecran.village@yahoo.fr