Permanence de soins médicaux de minuit à 8 heures : le flou administratif et médical.
Nous avions déjà évoqué à deux reprises dans nos colonnes les problèmes de territoires induits par la suppression nationale des permanences médicales (PDS) de minuit à 8 heures .
Les acteurs de terrain, les élus locaux, et les médias se sont exprimés.
Normalement la PDS avait été supprimée au 1 décembre 2012 , cet arrêté posant des problèmes le statut en cours avait été prolongé jusqu’au 31 mai 2013 pour l’Ardèche dont le relief tourmenté rendait difficile le principe de l’accessibilité des soins en moins de 30 minutes.
Ce mercredi 3 avril je me suis rendu en tant que médecin libéral « gérant » la PDS pour le secteur Lamastre Vernoux à Privas à l’antenne ardéchoise de l’Agence Régionale des Soins . Les acteurs locaux impliqués sur le terrain , médecins , pompiers , SAMU , permanenciers du centre 15 ont réexprimé leurs difficultés à assumer au contact des populations la disparition de l’accès aux soins de premiers recours , les acteurs des Hôpitaux Locaux ont exposé leurs craintes de voir leurs structures hospitalières fragilisées.
Après de nombreux échanges il a été annoncé par Madame le médecin inspecteur bi-départemental Ardèche/Drôme que le satus quo serait maintenu jusqu’au 30 novembre 2013 .Cette prolongation étant destinée à permettre aux acteurs de terrain de mettre en place des médecins correspondants samu , dont le statut et le texte d’application ne sont pas encore parus, et c’est ce point qui pose le plus de problèmes…., et les hôpitaux locaux de chercher des solutions pour leur continuité des soins en interne . Ce compromis temporaire paraissait satisfaire les médecins présents à la réunion , l’hypothèse d’une prolongation ad vitam eternam a été réfutée par les tutelles.
La réunion paraissait avoir été constructive. Certaines erreurs de cartographie et de répartition de secteurs avaient été mises en évidence, les secteurs de l’ARS et les secteurs du conseil de l’Ordre n’étaient pas identiques . Rendez vous était donc pris à l’automne pour le passage obligatoire de fin de dérogation , ce qui permettait de passer un été dans la continuité.
Mais c’était le 3 avril , et le 5 avril le communiqué de presse était plus sibyllin , je vous le livre :
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COMMUNIQUE
Lyon, vendredi 5 avril 2013
Nouvelle organisation de la permanence des soins ambulatoires et de l’accès aux soins urgents en Ardèche > L’ARS Rhône-Alpes poursuit les discussions avec les médecins généralistes
En novembre 2012, le directeur général de l’ARS Rhône-Alpes a adopté le cahier des charges régional qui redéfinit l’organisation de la permanence des soins ambulatoires en Rhône-Alpes.
Sa déclinaison territoriale sera fera progressivement dans les prochains mois. Dans le département de l’Ardèche, l’ARS travaille depuis plusieurs mois avec les professionnels concernés pour définir les modalités de mise en oeuvre de ce nouveau schéma d’organisation.
Une nouvelle organisation adoptée fin 2012 et déployée progressivement en 2013
L’Agence régionale de santé est chargée d’organiser la permanence des soins ambulatoires, c’est-à-dire l’accès à un médecin généraliste par secteur, aux heures habituelles de fermeture des cabinets médicaux et des maisons de santé (la nuit, le samedi après-midi, le dimanche et les jours fériés).
Dans le cadre de la lutte contre les déserts médicaux, qui a fait l’objet d’un débat départemental organisé par l’ARS à Privas le 14 mars dernier, l’ARS a adopté, le 1er décembre 2012, un nouveau cahier des charges régional de la permanence des soins ambulatoires élaboré en concertation avec tous les acteurs1 de la permanence des soins pendant près de deux années.
L’organisation de la permanence des soins ambulatoires et de la prise en charge des urgences doit répondre à trois objectifs :
_ Faire venir les jeunes médecins dans les territoires isolés et dans les meilleures conditions. Toutes les enquêtes montrent que les jeunes médecins ne veulent plus s’installer dans les secteurs où il y a des gardes 24h/24h s’il n’y a pas d’activité durant ces nuits et week-end d’astreintes.
Ainsi de nombreux médecins de la région Rhône-Alpes ne réalisent déjà plus de permanence des soins ambulatoires en nuit profonde (entre minuit et 8 heures du matin). Fin 2011, seulement
37 % des 220 secteurs de Rhône-Alpes disposaient d’une astreinte en nuit profonde.
_ Maintenir la rémunération des médecins généralistes actuels sur ces secteurs.
_ Organiser la médecine d’urgences dans ces secteurs isolés.
L’ARS Rhône-Alpes a organisé une table ronde à Privas le 3 avril pour présenter aux acteurs de terrain la réorganisation de la permanence des soins ambulatoires dans le département de l’Ardèche.
Cette table ronde a permis d’échanger sur les modalités de mise en œuvre et sur les attentes des médecins quant à la nouvelle organisation. Les médecins présents ont exprimé leurs craintes et formulé des propositions. Plusieurs d’entre elles seront relayées par les représentants de l’Union régionale des professionnels de santé médecins libéraux (URPS-ML) dans le groupe de travail animé par l’ARS.
1
Préfets, représentants des collectivités territoriales, représentants des usagers, partenaires de l’aide médicale urgente, Ordres des médecins, pharmaciens et chirurgiens-dentistes, Unions régionales des professionnels de santé, Croix-Rouge française, syndicats, associations de permanence des soins (maisons médicales de garde, SOS médecins), représentants de l’hospitalisation publique et privée, représentants des transports sanitaires, etc.
2
La nouvelle organisation prévoit l’arrêt de la permanence des soins en nuit profonde de secteurs dont l’activité sur cette tranche horaire (minuit à 8 heures du matin) est inférieure à 1 acte par semaine.
Neuf secteurs de l’Ardèche sont concernés par cet arrêt de l’astreinte des médecins en nuit profonde: Saint- Félicien ; Saint-Agrève ; Lamastre/Vernoux ; Coucouron ; Thueyts ; Joyeuse ; les Vans ; Ruoms/Vallon Pont d’Arc en hiver ; Saint-Martin d’Ardèche en été. Dans plusieurs de ces secteurs les médecins d’astreinte réalisent moinsde deux actes par mois en nuit profonde. La permanence des soins en nuit profonde sur ces territoires isolés est donc justifiée pour des actes d’urgence et non pour des actes de médecine générale.
Afin de tenir compte au mieux de la réalité des situations de terrain, cette réorganisation est mise en oeuvre de façon progressive. Ainsi dès novembre dernier, une dérogation a été inscrite dans le cahier des charges régional pour reporter cette application au 31 mai prochain pour les secteurs qui ne seraient pas prêts et pour permettre à l’ARS, en lien avec les médecins et le comité départemental de l’aide médicale urgente, de la permanence des soins et des transports sanitaires, de traiter l’ensemble des conséquences de cette mesure.
Des « Médecins correspondants Samu » pour répondre aux besoins des territoires isolés
L’ARS est vigilante sur la prise en charge des urgences 24h/24 et sur la nécessité de maintenir la rémunération des médecins lorsqu’ils sont seuls ou peu nombreux dans ces secteurs.
Ainsi l’ARS travaille sur la réponse à apporter aux territoires isolés et sur la mise en œuvre de l’engagement du Président de la République d’assurer un accès à des soins urgents en moins de trente minutes. Dans ce cadre, le dispositif des médecins correspondants du SAMU, déjà très bien développé dans plusieurs départements de la région avec 120 « médecins correspondants Samu », apparait comme une solution pertinente.
Ces médecins sont les médecins généralistes du secteur formés à l’aide médicale urgente et intervenant 24h/24h, donc aussi en nuit profonde, à la demande du Service d’aide médicale d’urgence (SAMU), en complément de l’action des Services mobiles d’urgence et de réanimation (SMUR).
Ce dispositif de « médecins correspondant SAMU », quand il existe, renforce l’égalité d’accès aux soins pour les patients des zones éloignées des services hospitaliers d’urgence.
Son extension et la rémunération de cette fonction de « médecin correspondant SAMU » fait l’objet d’études et de discussions actuelles régionales et nationales.
Les médecins présents à la table ronde sont dans l’attente des conclusions du groupe de travail régional sur la définition du « statut » de ces « médecins correspondant Samu ». Les représentants des secteurs du Sud Ardèche envisagent d’ores et déjà une expérimentation sur un ou deux secteurs (Joyeuse / les Vans) si les conditions proposées leur semblent intéressantes.
L’ARS souhaiterait, quant à elle, pouvoir mettre en place ce dispositif « médecins correspondants Samu » dès le 1er juin 2013.
L’ARS a également rappelé que la période dérogatoire pourrait être prolongée de 6 mois pour les secteurs qui ne pourraient pas entrer dans le nouveau dispositif de » médecins correspondant SAMU » au 1er juin prochain.
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L’Agence régionale de santé Rhône-Alpes a été créée le 1er avril 2010. Cet établissement public, constitué de 830 personnes, est un opérateur de l’Etat et de l’Assurance Maladie. L’Agence regroupe donc les forces de l’Etat et de l’Assurance maladie en région et se substitue aux pôles santé des DDASS et DRASS, à l’Agence régionale d’hospitalisation (ARH), à l’Union régionale des caisses d’assurance maladie (URCAM), aux pôles organisation des soins de la Caisse régionale d’assurance maladie (CRAM) et de la Direction régionale du service médical (DRSM), au Groupement régional de santé Publique (GRSP), et à la Mission régionale de santé (MRS). Créée par la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) du 21 juillet 2009, l’ARS met en oeuvre au niveau régional la politique de santé publique selon trois grandes missions : la protection et la promotion de la santé, la régulation de l’offre de santé dans les secteurs ambulatoire, hospitalier et médico-social, l’appui à l’efficience des établissements et des services sanitaires et médico-sociaux. L’Agence régionale de santé Rhône-Alpes est présente dans les 8 départements de la région. Son siège se situe à Lyon. Elle dispose de délégations territoriales à Bourg-en-Bresse, Privas, Valence, Grenoble, Saint-Etienne, Chambéry et Annecy.
Ce sont les phrases suivantes qui me font apprécier le texte comme sybillin : « L’ARS a également rappelé que la période dérogatoire pourrait être prolongée de 6 mois pour les secteurs qui ne pourraient pas entrer dans le nouveau dispositif de » médecins correspondant SAMU » au 1er juin prochain. » Il me parait en effet difficile d’adhérer à une protocolisation des soins sans que le texte de loi soit mis en texte de façon cohérente et que son application en soit décidée de façon consensuelle. Le cahier des charges initial est très contraignant et parait intenable pour les acteurs comme le libellé préliminaire l’indique : Ces médecins sont les médecins généralistes du secteur formés à l’aide médicale urgente et intervenant 24h/24h, donc aussi en nuit profonde, à la demande du Service d’aide médicale d’urgence (SAMU) .
24h/24h c’est pas un contrat c’est un vrai sacerdoce !
A suivre donc .
Raymond Bouit.
la réponse « syndicale » de ce jour :
« L’ARS Rhône-Alpes a décidé la suppression de la permanence des soins au delà de minuit sur toute la Région, en particulier afin de réduire la masse annuelle des forfaits d’astreinte. Et de palier à cela dans les zones éloignées des bases de SMUR, par le développement d’un dispositif médecin correspondant SAMU (MCS), assuré par certains des médecins généralistes exerçant déjà dans ces secteurs.
Dans son communiqué de presse du 5 avril dernier l’ARS déclare que, à la suite des réunions qui ont eu lieu dans le département de l’Ardèche, la mise en place du dispositif MCS pourrait être effective très rapidement et certains secteurs (Joyeuse /Les Vans) seraient candidats à une éventuelle expérimentation, en laissant même supposer que le dispositif pourrait être mis en place dès le premier juin 2013.
D’abord il est surprenant que, dans un communiqué qui n’est pas de rédaction commune, l’ARS relate la position de l’une des parties, en l’occurrence des médecins.
Et c’est aller un petit peu vite en besogne…
Avant toute chose il faut que le cadre juridique, la formation et la rémunération des futurs médecins correspondants SAMU (MCS) soient clairement définis et approuvés par l’ensemble des acteurs de terrain concernés. C’est le sens des déclarations des médecins de ses secteurs lors d’une réunion préalable qui a eu lieu à Joyeuse et qu’ils ont exposés lors de la réunion du 03 Avril.
Pour MG France Rhône-Alpes la conclusion des discussions sur le statut du Médecin Correspondant SAMU qui sont en cours tant au niveau national que régional est un préalable à la suppression du dispositif antérieur quel que soit le secteur de notre région.
Avoir un dispositif MCS cohérent et accepté aussi bien par les médecins que par la population est gage de sa réussite.
Par contre s’imposer une échéance pré-établie, est le meilleur moyen de faire capoter le dispositif et donc au final de perdre beaucoup de temps.
D’autre part MG France Rhône-Alpes remet en garde les autorités de santé contre toute mesure qui aboutirait à la fragilisation économique et donc l’existence même des cabinets dans des zones déjà peu pourvues. »
Le bureau de MG France Rhône-Alpes