C’est le jeudi 22 août que Noémie et Emile Mandon recevront à titre posthume la médaille des Justes parmi les Nations .
Un article avait déjà annoncé la nomination, et il a fallu un peu de temps pour que les disponibilités de chacun permettent cette cérémonie.
http://www.lamastre.net/2010/03/19/reconnaissance-deux-medailles-des-justes-a-lamastre/
La cérémonie aura lieu dans la minoterie Mandon où Noémie et Emile Mandon avaient secouru pendant les heures sombres de l’occupation et de la collaboration la famille Klein qui est à l’origine de cette reconnaissance.
Le Comité Français de Yad Vashem organise la cérémonie; c’est une association française loi de 1901 qui intervient en délégation de l’institut Israélien du même nom, lieu de mémoire de la Shoah situé à Jérusalem.
Coïncidence de date le livre de Natahalie et Stanislas Gara traitant de l’accueil des juifs en zone libre et en particulier à St Basile a connu une dédicace le 10 août à la librairie l’Arbre à Feuilles, la réédition actuelle est en anglais , je connais la version initiale française qui est croustillante d’anecdotes historiques.
http://www.lamastre.net/2013/08/07/un-ete-42-en-ardeche/
La cérémonie de ce 22 août comportera plusieurs phases avec un aspect officiel en présence de Mr Vallon , premier magistrat de la commune; puis un aspect privé et familial entre les 3 familles , Mandon, Vergnon et Klein.
La résistance et l’esprit qui l’animait en 1940 revêtait plusieurs aspects politiques, patriotiques, humanistes et religieux. L’état Français de l’époque 1940 était pétainiste , pour devenir avec le retour de la République en 1944 Gaulliste et Lamastre n’échappait pas à cet état de fait.
En ce qui concerne la cause des juifs de l’époque l’aspect religieux est important comme l’était la religion à cette époque et Lamastre constituait une antenne du réseau du Chambon sur Lignon. Ces aspects ont été décrits dans les livres « Montagnes Ardéchoises dans la Guerre » de Louis Frédéric Ducros et les livres sur Lamastre et Désaignes de Paul Bouit. C’est l’aspect humaniste et d’essence religieuse qui est en compte dans cette implication de Noémie et Emile Mandon.
Voici quelques extraits de Montagnes Ardéchoises sur ce sujet (Tome 1 la Genèse) :
Lamastre a déjà vécu en juin 2001 une cérémonie des Justes en l’honneur de Rosa Ranc qui avait hébergé le Pasteur Trocmé dans sa fuite et sauvé l’enfant juive Muriel Béraha.
Le Comité Français pour Yad Vashem en élargissant la cérémonie de remise de Médaille aux représentants de la République permet ainsi à toute la communauté de notre 21 siècle d’être associée à ce souvenir. Ceci permet de donner ainsi un caractère mémoriel élargi nécessaire à la gravité du sujet. L’intérêt de ce devoir de mémoire étant bien sûr de servir d’exemple pour le futur.
La participation de la République permet ainsi de légitimer cet hommage en lissant l’aspect communautaire.
En marge de cette cérémonie particulière et d’essence humaniste on peut aussi se remémorer d’autres actions lamastroises pour lesquelles Emile Mandon a eu un engagement majeur, il s’agit là de la partie patriotique et républicaine, au sens historique de l’époque, de son action.
Seignobos , icône locale de l’esprit Républicain de la Troisième République, avait vu son buste trônant face à la mairie de Lamastre déboulonné par le gouvernement de Vichy pour être destiné à être transformé en métal fondu pour l’effort de guerre allemand. Et c’est ainsi que en 1942 quelques lamastrois avaient œuvré pour détourner le buste et le mettre à l’abri chez Mandon jusqu’à la libération. Et ainsi éviter que ce buste républicain français et lamastrois ne se transforme en canon allemand.
un extrait de la Mémoire du Savel
avec un article complet sur ce sujet signé Max Dejour : http://www.lamastre.net/histoire/seignobos/Seignobos.htm
Félicitations posthumes à Noémie et Emile Mandon et félicitations à la Famille Mandon Vergnon dont les trois enfants Jeannine Reyne , Marinette Mandon et Pierre Mandon vont vivre une journée particulière et émouvante grâce à la reconnaissance de la famille Klein.
Raymond Bouit.
[…] Mon discours (lu par ma mère en mon absence) à l’occasion de la remise de la médaille des Justes parmi les nations à Mr et Mme Mandon, cérémonie organisée par le comité Yad Vashem le 22 août 2013 à Lamastre. […]
Par Thierry Klein dans : Humeur.
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Mon discours (lu par ma mère en mon absence) à l’occasion de la remise de la médaille des Justes parmi les nations à Mr et Mme Mandon, cérémonie organisée par le comité Yad Vashem le 22 août 2013 à Lamastre.
J’ai toujours un sac de jute dans mon bureau.
Pendant toute mon enfance, j’ai entendu les “légendes” liées à Lamastre. J’ai toujours su que mes grands- parents et mon père s’y étaient cachés pendant la guerre, avaient été accueillis par “Les Mandon” qui leur avaient sauvé la vie à plusieurs reprises.
Mon père nous racontait des histoires de sauvetage – à l’école, lors d’une rafle ou cachés dans les bois – aventures qui, avec le recul des ans prenaient parfois un tour comique dans le style de la grande vadrouille puisque, pour ma famille du moins, tout s’était bien terminé. Il m’a fallu des années pour comprendre à quel point ce qui s’était passé à Lamastre m’avait marqué, moi qui pourtant n’avait rien vécu des peurs de la guerre . Et le côté vraiment exceptionnel et universel de se qui s’ y est joué, je ne l’ai saisi que bien plus tard encore, après la mort de mon grand-père.
Ce qui est exceptionnel dans les actes de résistance des Mandon, ce qui les rend encore plus grands, c’est qu’ils ont eu lieu “tout simplement”, sans jamais être revendiqués. Jamais les Mandon n’ont prétendu donner l’exemple, jamais ils n’ont chercher à rendre leur sauvetage public, à ce qu’il soit l’objet d´un livre, d’une émission de télé ou tout simplement d’un devoir de mémoire.
A tel point qu’il y a un côté incongru ou sacrilège à tenir aujourd’hui une cérémonie qu’ils n’ont pas exigé et dont peut être ils n’auraient pas voulu.
Ce que les Mandon ont donné est au delà de toutes les cérémonies mais il reste important pour nous tous, y compris pour nos enfants, de savoir qu’ils ont su se dresser dans un but simplement altruiste, humanitaire, moral sans aucune attente de récompense, de remerciement, ni même aucune attente de reconnaissance.
Cette absence de toute revendication fait bien partie du message et est une des raisons pour lesquelles les actes des Mandon touchent à ce qu’il y a de plus grand, de plus universel dans l’expérience humaine.
Au moment où l’Europe était emportée par des torrents de propagande, de haine et de violence, le soleiĺ ne s’est jamais complètement couché sur Lamastre. Les Mandon ont éclairé cette immense tragédie d’une lumière qui en rachète l’horreur et l’amertume et nous permet de garder foi en l’homme . C’est ce qui fait d’eux,au sens biblique du terme, des Justes. Ce qui nous reste de cette guerre 70 ans plus tard, et pour l’éternité n’est plus la désolation, mais une immense admiration, une immense espérance, qui pourra nous stimuler et nous encourager.
“Comment cela s’appelle-t-il, quand le jour se lève, comme aujourd’hui, et que tout est gâché, que tout est saccagé, et que l’air pourtant se respire, que la ville brûlé mais que les coupables agonisent, dans un coin du jour qui se lève ?
– Demande au mendiant, il le sait.
– Cela à un très beau nom, femme Narsès. Cela s’appelle l’aurore.” Jean Giraudoux, Électre.